Les Rues d’Aix
ou recherches historiques sur l’ancienne capitale de Provence
par Roux-Alpheran en 2 tomes 1848 et 1851
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HÔTEL-DE-VILLE
ous avons prouvé 1 que cet hôtel existe au lieu où nous le voyons depuis le XIVe siècle ; et sans revenir sur ce point, nous dirons que l’empereur Charles-Quint pénétra en Provence en 1536, à la tête d’une armée de cinquante mille hommes qu’il destinait à conquérir la France. Il s’empara facilement de la ville d’Aix, que ses principaux habitants avaient abandonnée, attendu qu’on n’avait pas jugé possible de la fortifier. L’entrée de ce prince eut lieu le 9 août, et le lendemain il se fit couronner roi d’Arles et comte de Provence dans l’église métropolitaine de Saint-Sauveur, par l’évêque de Nice qu’il avait à sa suite. Mais ses troupes ayant échoué devant les villes de Marseille et d’Arles, l’empereur fut bientôt obligé de repasser en Italie. Le duc de Savoie, qui l’avait également suivi, ordonna au moment de la retraite, qu’on mit le feu au Palais et à l’Hôtel-de-Ville, espérant, dit-on, anéantir par là les litres qui prouvaient l’usurpation que ses prédécesseurs avaient faite du comté de Nice sur les comtes de Provence. Mais son attente fut trompée, car avant l’arrivée de Charles-Quint, on avait eu soin de faire transporter dans le château des Baux les archives de la chambre des Comptes où ces titres pouvaient se trouver. Les archives de la ville furent donc seules la proie des flammes, ce qui nous a privé de la plupart des registres et documents qui y étaient conservés. 2
Ce mémorable incendie, bien indigne d’un prince tel que Charles-Quint, et dont ses historiens ne font aucune mention, non moins indigne du duc de Savoie, Charles III, dit le bon, fut constaté sur le marbre dans une inscription placée, deux ans après, dans la salle des séances du conseil de ville: inscription qui a disparu lors de la réédification de l’édifice en 1656, et qui était ainsi conçue :
INCENSA FUIT ET COMBUSTA DOMUS ILEC A CAESARIANIS MILITIBUS CAROLI QUINTI, ANNO 1536, MENSE AUGUSTI, IN GALLIAM NARBONENSEM CONTRA CHRISTIANISSIMUM
REGEM PROFICISCENTIS. RESTITUTA AEDIFICIOQUE AUCTA CONSILIBUS ET ASSESSORE SPIRITU DE ROUSSET, CLAUDIO REMUSATI, MILANO RICI ET BERNARDO SERRE, A PARTU
VIRGINIS, ANNO 1538, 7 KALEND. JANUAR.
Place de l’Hôtel-de-Ville
En 1652, le conseil municipal délibéra de faire rebâtir l’Hôtel-de-Ville qui menaçait ruine de toutes parts, » attendu sa vétusté « , disent les deux délibérations des 25 mars et 27 juin de cette même année. 3 Le 1er octobre suivant, par acte passé par Barthélemy Decitrane, notaire et greffier de la ville, les consuls et assesseur d’Aix, qui étaient alors Laurent de Forbin, marquis de Janson, Guillaume Blanc, avocat, François d’Honorat de Boniparis, seigneur de Pourcieux, et Esprit Anglès, acquirent de Jérôme de Duranti, 4 seigneur de Saint Antonin et de Saint-Louis de la Calade, conseiller en la cour des comptes, et de ses enfants, comme héritiers de Sibile d’Escalis de Bras, leur mère, une maison située à la rue Droite, confrontant du levant ladite rue et la tour de la Grande-Horloge, du midi, la maison commune, et ce, au prix de sept mille cinq cent cinquante livres, » laquelle maison, acquise des sieurs de Duranti, père et fils, servira, est-il dit, à agrandir l’Hôtel-de-Ville, dont la reconstruction a été délibérée par le conseil. » Cette reconstruction ne fut commencée cependant que quatre ans après et entièrement terminée qu’en 1668. Un contrat du 9 août 1659, reçu par le même Decitrane, contient le prix fait des ornements de sculpture de la façade, et nous apprend que les artistes qui s’en chargèrent furent Pierre Pavillon, 5 Jean-Claude Rambaud et Jacques Fossé, 6 maîtres sculpteurs de cette ville. On peut se souvenir d’avoir vu sur cette façade les statues en pied de Charles III d’Anjou, comte de Provenue, et de Louis XI, roi de France, qui fut l’héritier de ce prince en 1481; un buste colossal de Louis XIV et un écusson aux armes de France soutenu par des anges. Ces ouvrages de Pavillon ont été détruits en 1792, lors de la chute du trône de Louis XVI. L’Hôtel-de-Ville devint donc, au milieu du XVIIe siècle, un édifice considérable, digne de la capitale de la Provence. On voit, par une délibération du 18 novembre 1673, que les premiers consuls, procureurs du pays qui, bien souvent, n’étaient pas d’Aix, y eurent leur logement, ce qui toutefois ne subsista guère plus de cinquante ans.
En 1716, la décoration de la grande salle où se tenaient les conseils de ville, fut sous l’influence et par les soins de Joseph Etienne de Meyran-Lacetta, marquis de Lagoy alors premier consul, appartenant à une ancienne famille d’Arles, dans laquelle s’est fondue depuis la famille Piquet de Méjanes, de la même ville, et qui s’est établie dans la notre de nos jours. 7
L’exécution de la délibération prise à ce sujet, le 6 mars, par le conseil de ville, fut confiée à des peintres distingués qui alors florissaient à Aix. Les Cellony père et fils, 8 et Viali, 9 qui furent chargés de peindre les portraits des anciens comtes de Provence et des rois de France leurs successeurs. Mais la peste qui fit tant de ravages en Provence en 1720 et 1721, suspendit leurs travaux, et l’ouvrage ne fut enfin terminé qu’en 1726. Le 31 décembre de cette année, Pierre Simon, assesseur, annonça au conseil : » que ses collègues et lui avaient cru ne pouvoir mieux » embellir la grande salle de l’Hôtel-de-Ville , qu’en y plaçant les portraits des comtes de Provence et des rois de France qui leur ont succédé jusqu’à présent. C’est sous la direction et par les soins du sieur de Haitze 10 que ces portraits ont été exposés.
« Il en a fourni les copies aux sieurs Cellony, père et fils, et au sieur Viali, peintres de cette ville, et il a travaillé annuellement au plan de toutes les peintures et autres ornements qui doivent servir à l’entier embellissement de ladite salle. »
L’assesseur ajoute : » qu’il est bon de faire savoir an conseil que le sieur Pierre Joseph de Haitze , de cette ville , s’est si fort dévoué à la gloire de la patrie , qu’après avoir composé l’histoire d’Aix , prête à être mise au jour, il a ensuite travaillé pendant deux ans à dresser l’armorial consulaire qui va être distribué et s’est encore chargé agréablement du soin de diriger les peintures de cette salle de l’Hôtel-de-Ville, ayant fourni des copies, prises sur les originaux des portraits des anciens comtes de Provence qu’on y a étalés, et choisi les sujets historiques des grands tableaux de cette même salle dont il va s’occuper de donner la description ; ne désirant et n’ayant voulu accepter pour toute gratification que le glorieux témoignage qu’il soit fait mention dans les registres de tout ce que dessus, afin qu’il y ait une preuve authentique et un monument public de son zèle pour le plus grand lustre de cette capitale dont il a l’honneur d’être citoyen, ayant généreusement rejeté, en homme de sa condition , toute autre marque de la reconnaissance publique.
Sur quoi, le conseil a unanimement délibéré et prié MM. les consuls de remercier le sieur de Haitze au nom de la communauté de cette ville, comme un de ses meilleurs habitants, de sa générosité, de ses peines et de tous les soins qu’il continue de se donner pour travailler à sa gloire et à son honneur. »
Il semble résulter de la rédaction de cette délibération que les grands tableaux historiques étaient déjà en place en 1726. Cependant ils ne furent peints que cinq ou six ans après, car on lit dans une nouvelle délibération du 30 novembre 1731, que noble Claude-François Pazéry, seigneur de Thorame, alors assesseur, informe le conseil que M. de Haitze continue de donner ses soins pour la décoration de la grande salle , et qu’il conviendrait de profiter du séjour que fait en ce moment à Aix M. d’André-Bardon, fils de M. d’André, consulaire, pour lui faire exécuter les tableaux dont ledit M. de Haitze a fourni les sujets. Sur quoi, le conseil, après avoir voté de nouveaux remerciements à M. de Haitze charge le peintre d’André-Bardon 11 de cette exécution. M. d’Angeville dit, dans l’éloge historique de ce peintre : » que les connaisseurs trouvent dans cette suite de tableaux le plan bien entendu, le goût du dessin d’une très belle manière , la couleur ragoûtante et les ingénieux effets de l’école vénitienne réunis aux grâces de l’école française.12 »
Ces tableaux historiques, au nombre de neuf, ainsi qu’un Christ et un portrait en pied de Louis XIV, ouvrages de Reinaud Levieux 13, peintre languedocien, qui a laissé tant de belles peintures dans Aix où ils décorent encore nos diverses églises, remplissaient les onze grands cadres que l’on voit dans cette salle du conseil de ville. Les petits cadres, au nombre de cinquante-huit, entouraient les portraits des anciens comtes et comtesses de Provence et des rois de France depuis Louis XI. Les unes et les autres de ces peintures furent détruites le 21 août 1792, par une horde de brigands étrangers à la ville d’Aix et même à celle de Marseille d’où ils étaient venus, dignes émules de ceux qui, le 10 du même mois, avaient renversé, aux Tuileries, le trône du vertueux et infortuné Louis XVI. Au mois de décembre suivant, M. Gibelin, 14 notre compatriote, peintre d’histoire, alors officier municipal, proposa le rétablissement de ses ouvrages, non comme ils étaient auparavant, mais en les remplaçant par des sujets tirés de l’histoire des anciennes républiques et par les portraits des plus illustres républicains. Mais ce projet n’eut aucune suite, et depuis cinquante-quatre ans les habitants d’Aix ont devant les yeux le spectacle affligeant des dévastations opérées dans cette salle en 1792.
Nous dirons peu de mots sur la riche et magnifique bibliothèque Méjanes, qui occupe la majeure partie du premier étage de l’Hôtel-de-Ville, et à laquelle il faudra joindre bientôt l’autre partie pour son entier développement : immense dépôt des connaissances humaines, composé de plus de cent mille volumes, dus la plupart à la générosité du marquis de Méjanes, 15 et qui s’accroît chaque jour par les dons du gouvernement et des particuliers. 16 La savante notice 17 de M. Rouard, Bibliothécaire actuel, sur cet important établissement , nous dispense d’en parler plus longuement ici. Que pourrions nous dire d’ailleurs après un écrivain aussi distingué ? Toutefois ce serait manquer à la reconnaissance, si nous ne répétions pas ce qui a été dit si souvent, que la conservation de cette bibliothèque pendant les jours orageux de la révolution, est due au patriotisme et au zèle de l’excellent docteur Gibelin, 18 si connu par sa science, son désintéressement et sa modestie. D’Aubenton, Bertholet, Broussonet, Chaptal, Fanjas Saint Fonds, Félix Fontana furent, dès ses jeunes ans, ses amis particuliers, et il se lia depuis avec Pringle, Fergusson, Priestley, Monge, Bosc et une foule d’autres savants qui ont rempli l’Europe de leurs noms. A la mort de l’abbé Rive 19 que les excès les plus dégoûtants ont rendu célèbre dans notre ville, le docteur Gibelin fut appelé à le remplacer comme bibliothécaire, et c’est pendant quinze ou dix-huit ans qui s’écoulèrent entre cette époque et celle où la bibliothèque Méjanes fut ouverte au public, qu’il la préserva de la dévastation, en mit les livres en ordre et en dressa le catalogue. Outre un grand nombre d’ouvrages qu’il a laissé en manuscrit, 20 il avait publié, de son vivant, dix-neuf volumes traduits de l’anglais, tels que des expériences et observations sur différentes espèces d’air, et sur quelques branches de la physique, par le docteur Priestley; des éléments de Minéralogie, par Kirvan ; l’Abrégé des transactions philosophiques de la Société Royale de Londres ; des Mémoires de la vie privée de B. Franklin ; l’Histoire des progrès et de la chute de la république romaine, par Fergusson; etc., et quatre volumes traduits de l’italien , de l’abbé Félix Fontana , qui sont des Observations sur l’air déphlogistiqué des opuscules physiques et chimiques ; enfin, un traite du venin de la vipère.
Il sera peut-être curieux de rappeler en l’an de grâce 1846, le cinquante-septième de la liberté, de quelle manière se faisait la nomination de nos magistrats municipaux alors que nos pères gémissaient de l’esclavage, comme le savent si bien les générations.
Le samedi le plus voisin du 30 novembre, qui est le jour de la fête de Saint-André, avait lieu, sous l’ancien régime, l’élection de MM. les consuls et assesseur d’Aix , procureurs du pays. 21
Voici quelles étaient les formes de cette élection qu’on pouvait considérer comme la plus belle des prérogatives de notre ville, puisque, sous ce titre de procureurs du pays, nos consuls et assesseurs étaient les administrateurs-nés du comté de Provence, sous l’autorité des états-généraux de cette province.22
Dés la veille, le conseil de ville, composé de soixante conseillers et assemblé sous la présidence des consuls et assesseur en exercice, élisait les trente cités qui devaient renforcer ce conseil et procéder avec lui à l’élection. On nommait, à cet effet, au scrutin, cent des plus notables citoyens de la ville, pris parmi les nobles, les bourgeois, les notaires, les procureurs, les marchands, etc., au nombre de vingt pour chacun des quartiers de Saint-Jean, de Bellegarde, des Augustins, des Cordeliers et du Bourg Saint-Sauveur; et lorsque la nomination de vingt notables d’un quartier était faite, leurs noms écrits sur autant de bulletins séparés et pliés uniformément, étaient jetés dans une urne d’où un jeune enfant tirait six de ces bulletins, en présence du conseil, et les quatorze restants étaient aussitôt jetés au feu sans avoir été ouverts.
Les six bulletins de chaque quartier étaient immédiatement déposés dans un petit coffre qui se fermait à quatre clefs, et lorsque les trente cités étaient nommés, on plaçait ce coffre dans un coffre plus grand qui se fermait également à quatre clefs. Les consuls et assesseur les faisaient porter alors dans une armoire d’un cabinet attenant à la salle du conseil et qui se fermait encore à quatre clefs, après quoi ils se saisissaient des douze clefs, en retenaient quatre et distribuaient les autres huit à des membres du conseil choisis indistinctement. C’est ce qu’on nommait le sépulcre dont la garde était confiée jusqu’au lendemain aux cinq capitaines de quartier. Ceux-ci passaient la nuit dans ce cabinet et y soupaient aux dépens de la ville avec quelques amis qu’ils étaient libres d’inviter.
Le samedi matin, à huit heures moins un quart, les consuls et assesseur, leurs prédécesseurs et ceux des conseillers qui avaient été chargés des clefs, se rendaient à l’Hôtel-de-ville où ils ouvraient le sépulcre et en retiraient les noms des trente cités, qu’on envoyait aussitôt avertir à domicile de se trouver à dix heures et demie dans la salle du conseil.
A dix heures, MM. les consuls et assesseur, précédés de leur garde, des trompettes, des fourriers et des capitaines de quartier et accompagnés par le juge royal, se rendaient au palais pour prendre les deux conseillers et celui des gens du roi que le parlement avait désignés comme devant autoriser le conseil de l’élection. De retour à l’Hôtel-de-Ville, on y entendait la messe dans la chapelle qui s’y trouvait et qu’on a détruite, comme inutile, depuis la révolution ; après quoi on passait dans une salle voisine où était dressée une table d’une vingtaine de couverts, chargée d’un seul pâté de poisson et de quelques confitures qu’on mangeait debout.
On entrait ensuite dans la salle du conseil où étaient réunis les soixante conseillers de ville, les trente cités, ainsi que le Prince d’Amour, avant la suppression de ce haut dignitaire des cérémonies de la Fête-Dieu, l’Abbé de la ville, les capitaines de quartier et le trésorier, lesquels, avec les consuls et assesseur et les quatre prédécesseurs de ceux-ci formaient, le nombre cent six opinants. On pouvait néanmoins délibérer, pourvu qu’il s’y en trouvât soixante-quatre. L’assemblée étant formée, le doyen des commissaires du parlement, l’avocat général et le premier consul prononçaient des discours, et lorsqu’ils avaient cessé de parler, le public évacuait la salle ou il ne restait que les commissaires, le juge royal et tous ceux qui devaient opiner.
Chaque opinant venait, à son tour, prêter serment entre les mains du premier commissaire, de n’avoir été ni pratiqué, ni brigué, et de ne donner sa voix qu’à ceux qu’en son âme et conscience il jugerait dignes et capables d’exercer les charges de consuls et d’assesseur.
Le premier consul proposait alors son successeur et chaque opinant allait prendre successivement, des mains du second commissaire, une ballotte en drap noir qu’il allait déposer dans l’une des deux urnes placées sur une table devant les commissaires et les consuls : l’une peinte en rouge pour l’approbation, l’autre en jaune pour le rejet. Si le sujet proposé était admis, le premier consul proclamait son nom à haute voix, et en cas de rejet il en présentait un autre qui était également ballotté, et ainsi de suite jusqu’à ce que le sujet proposé eût réuni la majorité des suffrages. En 1675, Jean Nicolas de Vento, marquis de Peyruis et seigneur des Pennes , ayant présenté successivement vingt-quatre gentilshommes de la plus hante qualité pour le remplacer, qui tous furent rejetés, il sortit du conseil avec les deux autres consuls, en protestant contre la cabale. L’assesseur resté seul fit la présentation, et son choix fut approuve par le conseil sans opposition. L’élection de l’assesseur se faisait ensuite de la même manière ; puis celle du second consul ; enfin celle du troisième consul. Il fallait que le tout fût fini avant minuit, laquelle heure passée, les commissaires du parlement rompaient l’assemblée et la nomination appartenait au roi, ce qui arriva en 1729, pour, le consulat de l’année 1730.
L’élection terminée, MM. les consuls et assesseur allaient ramener les commissaires chez eux , et allaient ensuite complimenter ceux des nouveaux consuls et assesseurs qui se trouvaient dans la ville ce jour-là. Ils revenaient ensuite à l’Hôtel-de-Ville, où les nouveaux élus venaient leur rendre la visite. Après quoi tous ensemble allaient, en grand cortège chez le gouverneur de la province ou, en son absence, chez le commandant en chef, chez l’intendant, les premiers présidents des cours souveraines et chez l’archevêque, en sa qualité de premier procureur-né du pays, à tous lesquels les consuls et assesseur avaient l’honneur de présenter leurs futurs successeurs.
Le lendemain dimanche , le conseil ordinaire procédait au renouvellement de la moitié de ses membres. Le premier consul et l’assesseur présentaient chacun huit conseillers, et les second et troisième consuls en présentaient chacun sept, ce qui formait le nombre de trente conseillers. Tous étaient ballottés et admis ou rejetés à la pluralité des suffrages , pour être en exercice pendant deux ans ; et lors même que les consuls et assesseur qui devaient n’être qu’annuels, étaient prorogés pour l’année suivante par ordre du roi , portant invitation au conseil de ne pas procéder pour cette année à leur élection, le conseil n’en était pas moins renouvelé par moitié annuellement. On nommait ensuite les capitaines de quartier et autres officiers de la ville; c’est ce qu’on appelait le nouvel état.
Telles étaient les anciennes formes, si différentes de celles d’aujourd’hui et dans lesquelles tout homme impartial ne pourra s’empêcher de reconnaître une liberté bien plus grande que celle que la révolution nous a donnée, du moins quant au choix de nos magistrats municipaux. Ces charges de courte durée et plus onéreuses que profitables à ceux qui on étaient revêtus, étaient néanmoins vivement désirées à cause de l’honorifique qui y était attaché. Aussi, voyait-on l’esprit public se manifester avec bien plus de patriotisme et d’éclat, à l’époque annuelle des élections, et de nobles rivalités se disputer la gloire de faire le bien du pays pendant la durée de leur pouvoir.
En 1674, Toussaint de Forbin , alors évêque de Marseille, connu depuis sous le nom de cardinal de Janson, fut nommé ambassadeur extraordinaire à la diète de Pologne, réunie pour l’élection d’un roi, et parvint, l’année suivante, à faire nommer, dans l’intérêt de la France, le grand Sobieski. De retour à Versailles, pour rendre compte de sa mission, Louis XIV lui dit:
– Mais où en avez-vous tant appris ?
– Sire, répondit l’habile négociateur, c’est en parcourant, la nuit, les rues d’Aix une lanterne à la main, pour faire les procureurs du pays, tandis que j’étais évêque de Digne. Il est vrai que, dans ce temps-là , il y avait plus d’intrigues qu’il n’y en a eu depuis, témoin l’anecdote que nous avons rapportée plus haut.
Autres temps, autres mœurs.
C’était le premier janvier qu’avait lieu, avant la révolution l’installation de MM. les consuls et assesseur d’Aix. Ces messieurs, au nombre de quatre (trois consuls et un assesseur, homme de robe, qui avait rang et séance entre le premier et le second consul) étaient entre eux égaux en droits et en honneurs. Nous avons dit qu’ils joignaient à leur titre celui de procureurs-nés des gens des trois Etats du pays de Provence, ou tout simplement de procureurs du pays, par abréviation, et qu’en cette dernière qualité, ils étaient les administrateurs-nés de la province, élus librement par le conseil de ville d’Aix.
Le 1er janvier donc, à huit heures du matin, les anciens consuls et assesseur, dont les fonctions devaient expirer le même jour, se réunissaient avec le juge royal à l’Hôtel-de-Ville. Ils en sortaient immédiatement, précédés de la garde, des fourriers des trompettes et des capitaines de quartier, et suivis du trésorier, des greffiers et de l’agent de la ville. Ils se rendaient chez le troisième consul élu, où se trouvaient rassemblés les parents et les amis de celui-ci , et où étaient prépares du café, du chocolat et des vins. Le cortège se remettait en marche au bout de quelques minutes et conduisait ce troisième consul élu à l’Hôtel-de-Ville.
Arrivés au milieu de la cour, le consul s’arrêtait, sur une de ces grandes pierres froides qu’on voit encore au niveau du pavé, se retournait en faisant la pirouette et saluait tous les assistants, puis faisait de nouveau la pirouette et allait attendre ses collègues dans celle des salles du rez-de-chaussée où se tiennent aujourd’hui les commissaires de police. Le cortège se rendait immédiatement chez le second consul élu qu’il conduisait dans le même ordre à l’Hôtel-de-Ville ; puis chez l’assesseur élu, enfin, chez le premier consul élu qui entrait en droiture avec tout ce monde, dans la salle où l’attendaient ses collègues, sans avoir fait comme eux aucune pirouette ni révérence au milieu de la cour. Inutile de dire que chacun de ces messieurs avait réuni chez lui ses parents et ses amis et avait fait préparer du café, du chocolat et des vins. Inutile encore de répéter que le second consul et ensuite l’assesseur avaient pirouetté et fait, comme le troisième consul, leurs révérences au cortège qui les avait conduit au milieu de la cour de l’Hôtel-de-Ville. 23
Les badauds et les oisifs qui, de tous les temps, ont abondé dans la bonne ville d’Aix, étaient fort curieux d’assister à ces révérences qu’ils regardaient comme une circonstance essentielle de l’installation. A ben vira! l’an ben fa virar ! se disaient-ils l’un à l’autre, avec un air de jubilation qui se peignait sur tous les visages, et cette innocente récréation les dédommageait amplement du froid et de l’humidité qu’ils enduraient pendant plus d’une heure, pour voir pirouetter leurs premiers magistrats.
A dix heures, les consuls et assesseurs, vieux et nouveaux, revenaient dans la cour de l’Hôtel-de-Ville et montaient sur une estrade qui y avait été préparée. Les consuls et assesseur vieux se plaçaient dans le fond et les nouveaux sur le devant, regardant les autres face à face. L’assesseur vieux faisait un discours de peu de durée aux consuls et assesseur élus , après quoi ses collègues et lui se dépouillaient de leurs chaperons, tandis que les consuls et assesseur nouveaux prenaient les leurs. Ils changeaient alors de places, les nouveaux allant s’asseoir dans le fond de l’estrade et les anciens sur le devant, et pendant ce temps-là on tirait les boites, les trompettes sonnaient des fanfares et les assistants battaient des mains. L’assesseur nouveau adressait quelques mots de compliments aux anciens magistrats, après quoi tous sortaient de l’Hôtel-de-Ville avec le même cortège qui les y avait accompagné, et marchaient sur la même ligne jusqu’à la grande porte de l’église métropolitaine de Saint-Sauveur, où ils se séparaient. Les nouveaux consuls et assesseur entraient dans l’église et prenaient leurs places dans le chœur, où ils assistaient à la grand’messe que célébrait ordinairement Mgr. l’archevêque, tandis que les anciens allaient directement à l’hôpital Saint-Jacques prendre possession de l’administration de cet hôpital, dont ils étaient les recteurs-nés en sortant du consulat ; car ce n’était alors ni cordons, ni habits brodés, ni robes rouges qu’ambitionnaient nos consuls et assesseur. Faire les affaires du pays qui les avait honoré de sa confiance ; maintenir ses libertés et ses franchises ; le défendre contre les entreprises toujours croissantes de l’autorité , voilà quel était leur but, 24 et leur récompense était d’aller servir les pauvres dans un hôpital.
A l’issue de la grand’messe , les consuls et assesseur allaient visiter celles des puissances qui se trouvaient ce jour-là dans la ville, c’est-à-dire le gouverneur et le commandant en chef de la province, l’archevêque président-né des Etats du pays, l’intendant et les premiers présidents du parlement et de la cour des comptes, aides et finances, à tous lesquels l’assesseur faisait un compliment en le traitant de monseigneur.
Ces visites finies, ils revenaient vers l’Hôtel-de-Ville et descendaient dans la rue des Orfèvres. A l’extrémité de cette rue, au point où viennent aboutir celles de la Sabaterie et de Beauvezet, se trouve une maison qu’il faut contourner pour entrer dans la rue de l’Official qu’elle masque entièrement. Cette maison qui fait face à la Grande-Horloge, placée à l’autre extrémité de la rue des Orfèvres, s’appelle la Boutique rouge depuis un temps immémorial, à cause de la couleur de sa devanture. 25
Sur le coin en allant vers l’Official, il existait anciennement une borne qui a déjà été enlevée et que nous aurions vu conserver avec plaisir s’il eût été possible, comme souvenir historique. Les consuls et assesseur montaient l’un après l’autre sur cette borne et y demeuraient, pendant quelques instants pour se montrer au peuple.
Ils allaient de là, toujours avec leur même cortège, à la porte Saint-Jean, où ils se reposaient sur un banc et où ils touchaient les clefs de la ville placées dans un bassin sur une table. Ils revenaient ensuite à la place des Prêcheurs et y faisaient quelques tours de promenade, adressant la parole aux personnes de leur connaissance qui s’y trouvaient; ils se rendaient enfin dans l’église de Saint-Barthélemy, à la rue Bellegarde, et y vérifiaient les reliques qu’on avait placées près de l’autel , du côté de la sacristie , et le corps de Charles II d’Anjou , roi de Naples et comte de Provence, mort en 1309, lequel était conservé en son entier dans cette église, comme nous le dirons ailleurs.26
Tout cela se faisait à la hâte et pour ainsi dire en courant attendu la rigueur de la saison à cette époque du 1er janvier. Mais lorsque ce cérémonial fut établi, il y a fort longtemps, l’installation des consuls avait lieu le 1er novembre , fête de la Toussaint, et on y mettait sans doute un peu plus d’importance et de gravité.
A deux heures après midi, le premier consul donnait, dans la grande salle de l’Hôtel-de-Ville, un repas d’environ soixante couverts, auquel il avait invité les puissances ci-dessus nommées, les consuls et assesseurs vieux et nouveaux, le juge-royal qui ne les avait pas quitté depuis le matin, les anciens consulaires, les trésoriers, greffiers et agents de la ville et de la province, enfin quelques parents et amis.
Après le repas, les consuls et l’assesseur montaient en voiture, précédés seulement par les fourriers et les trompettes, et allaient visiter les présidents, les doyens et les membres du parquet des deux cours souveraines, auxquels ils laissaient des billets sans demander à leur porte s’ils étaient chez eux.
Les premiers consuls étaient choisis parmi les plus grands seigneurs, possédant fiefs dans la province, marquis, comtes ou barons, soit qu’ils résidassent à Aix, soit qu’ils fissent leur demeure autre part. Ainsi, les plus illustres maisons de Provence portaient tour à tour le premier chaperon d’Aix, 27 telles que les Brancas, les Castellane, les Forbin, les Grimaldi, les Pontevès, les Simiane, les Villeneuve, les Vintimille et autres familles illustres par l’ancienneté de leur race, les hauts emplois dont elles étaient revêtues dans l’église ou les armées de terre et de mer, les services éclatants rendus par leurs ancêtres , leur grande fortune, l’immense considération qui s’attachait à elles et, peut-être aussi , le prestige qu’inspiraient toutes ces circonstances réunies.
Les Sabran étaient les seuls qui n’avaient jamais figuré sur ces listes fastueuses des premiers consuls d’Aix : serait-ce parce qu’ils croyaient leur maison au-dessus des autres, comme étant alliée aux anciens souverains du pays, et, par eux, à toutes les maisons princières de l’Europe ? 28
Les assesseurs étaient pris parmi les avocats postulants qui jouissaient de plus de réputation au palais par leur savoir et leur éloquence, et la ville citait avec orgueil parmi eux les plus célèbres jurisconsultes de Provence, tels que les Boniface et les Bonnet, les Dubreuil et les Dupérier, les Gensolen et les Julien, les Margalet et les Mourgues, les Portalis, les Saurin et les Siméon père et fils, et autres qui, tous, nous ont laissé de précieux fruits de leurs travaux, la plupart imprimés et qui sont encore consultés, quoique avec moins d’utilité qu’ils ne l’étaient de leur temps, depuis que la France entière est régie par une législation uniforme.
Les familles nobles d’Aix, qui ne possédaient pas de fiefs importants et les cadets de celles que leur présence dans la magistrature éloignait des fonctions municipales, fournissaient les seconds consuls, comme les bonnes et anciennes familles bourgeoise de la ville donnaient les troisièmes ou derniers de ces administrateurs Combien étaient honorables et honorées celles de ces familles qui, pendant plusieurs générations, avaient porté le chaperon ! Elles vivaient noblement comme on disait alors, quoiqu’elles n’eussent en général que peu de fortune, et s’alliaient le plus souvent entre elles ou à la noblesse du second ou du troisième ordre, plutôt qu’à des familles parvenues à l’opulence par le commerce ou par la profession d’un art mécanique.
Voilà bien assez de détails sur l’Hôtel-de-Ville. Disons, en finissant, que les Vallier y sont trompettes de père en fils depuis un Philibert Vallier, reçu en 1572, il y a actuellement deux cent soixante-quatorze ans. Que de fanfares ils ont dû sonner pour les Valois et la Ligue, Henri IV et ses glorieux descendants ; pour la Révolution, le Consulat, l’Empire, la Restauration, etc. ! La noblesse résultant de cette ancienneté en vaut bien une autre.
1 Voyez plus haut, pag. 67. Retour
2 A l’exception de deux cartulaires intéressants, de trois ou quatre registres où se trouvent transcrits quelques actes importants des siècles antérieurs à Charles-Quint, enfin des cahiers des délibérations du conseil de ville des années, 1351, 1485, 1492, 1499, 1520, 1521 et 1522, il ne reste plus dans ces archives aucun acte ni registre antérieurs à l’année 1536. Les cahiers dont nous venons de parler portent même les traces de l’ incendie ; les coins en sont la plupart brûlés, ce qui prouve qu’ils n’ont échappé que par hasard au feu qui a consumé tous les autres cahiers. Quant aux cartulaires et registres don nous avons également parlé, il est aisé de comprendre qu’une main officieuse les avait enlevés au moment où l’on mit le feu aux archives, comme étant peut-être ce qu’elles renfermaient de plus précieux. Retour
3 Si l’Hôtel-de-Ville n’avait été construit au lieu où nous le voyons que postérieurement à I’expédition de Charles-Quint , comme le prétend de Haitze, il n’aurait pas menacé ruine de toutes parts, attendu sa vétusté, en 1652, c’est-à-dire cent quatorze ans seulement après avoir été bâti. Il ne fut donc que réparé en 1538, et c’est là une nouvelle preuve que sa construction primitive remontait déjà à environ deux cent quatre-vingts ans, c’est-à-dire vers la fin du XIVe siècle. Retour
4 Cette famille, qui subsiste, est bien aujourd’hui l’une des plus anciennes qui puisse prouver, par des titres non interrompus, sa résidence dans la ville d’Aix où elle a commencé à occuper des charges municipales dès l’an 1326. Elle a fourni depuis lors, un très grand nombre de syndics, de consuls, d’assesseurs, de magistrats à la cour des maîtres rationaux et à la cour des comptes, aides et finances. La maison qu’elle vendit aux consuls en 1632, est figurée entre l’Hôtel-de-Ville et la Grande-horloge, dans le plan de la ville d’Aix, telle qu’elle existait en 1468, sous le roi René, gravé par H. Coussin, en 1749. Retour
5 Pierre fut le bisaïeul de Chartes Pavillon, directeur de l’académie royale de peinture d’Edimbourg, dont nous avons parlé, pag. 36. Retour
6 Marie Fossé, sa fille, épousa, le 25 janvier 1683 (paroisse Sainte-Magdelaine), Louis Vanloo, le premier de sa famille qui vint s’établir à Aix , fils de feu Jacques et d’Anne …………( le nom est resté en blanc sur le registre ), et fut la mère des célèbres peintres Jean-Baptiste et Charles-André, dit Carle Vanloo. Elle eut un troisième fils moins connu que ses frères, Joseph Vanloo, graveur, à Aix, dont il nous reste quelques gravures de portraits, et qui était né à San-Salvado (en Espagne ), ainsi qu’il est dit dans son acte de mariage du 5 novembre 1732, avec Delphine Félix, de Malemort, inscrit au registre de la paroisse dudit lieu. Retour
7 Voyez rue Saint Michel. Retour
8 Joseph Cellony, natif d’Aix, fils de Pierre et de Delphine Tassy, était, dès 1692, le peintre en portrait le plus distingué qu’il y eut dans cette ville. La ressemblance qu’il saisissait au point qu’on ne pouvait s’y méprendre, la correction de son dessin et la touche hardie de son pinceau dans le genre de Fauchier, lui donnèrent de la célébrité. Il mourut à Aix, le 18 janvier 1731, à l’âge de 68 ans, Joseph André Cellony, son fils unique, né à Aix, en 1696, fut envoyé de bonne heure à Paris pour s’y former, sous le fameux Hyacinte Rigaud, dans l’art qu’exerçait son père qu’il surpassa. Sa touche est plus douce et les étoffes qu’il peignait imitent mieux la nature, surtout celles de soie, par le transparent et le glacis qu’il y employait. Il mourut à Aix le 7 février 1746, à la fleur de son âge, laissant trois fils, dont l’un, Joseph Cellony, né en cette ville le 1er février 1730, fut également un peintre distingué, mais dans un autre genre. Il s’attacha à son compatriote d’André Bardon et peignit I ‘histoire comme lui. Ses principaux tableaux décoraient l’église des Bernardines de Marseille, celle des Chartreux de la même ville, le cabinet de M. de Fonscolombe, à Aix, celui de M. Borrély, à Marseille. Celui représentant Jephté revenant vainqueur des Ammonites, se trouvait chez ses frères, à Aix, lorsque Cellony mourut à Paris, en 1786, laissant, par son testament, à l’académie de Marseille, un tableau représentant la mort d’Alceste et quelques dessins de sa composition, signés de sa main. (Extrait d’une Notice manuscrite, que nous possédons, sur ces trois peintres, par Jean-Louis Cellony, leur petit-fils, fils et frère). Retour
9 Jacques Viali, natif de Trapano en Sicile, suivant ses lettres de naturalisation, enregistrées à la cour des comptes en 1720 (reg Papyrus, fol. 216), habitait déjà, à cette époque, la ville d’Aix où il mourut le jour de Noël , 25 décembre 1745, à l’âge de 95 ans. Il fut enseveli le lendemain dans l’ancienne église paroissiale de la Magdelaine, auprès de Vanloo qui était mort la même année. On voyait de lui, à Aix, un grand nombre de portraits aussi bien traités que ceux des deux Cellony, de Palme, des deux Sièyes, etc. – François Palme, fils de Paul et de Joanne de Cordoue, épousa à Aix, en 1656, Jeanne Valisset, dont le père et l’aïeul avaient également été peintres. Palme était natif de Lucques (voyez ses lettres de naturalisation aux archives de la cour des comptes, reg. Oppressa, fol. 504, v°). – Emmanuel Sièyes, de Fréjus, fils de Vincent et de Jeanne Bonnaud, épousa à Aix, en 1662, Françoise Ansis. Il est qualifié de peintre dans son acte mortuaire du 9 août 1697, et fut enterré dans l’église des Dominicains, aujourd’hui paroisse Sainte-Magdelaine en cette ville. – Mathieu Sièyes, son fils, né à Aix en 1668, est également qualifié de peintre dans son mortuaire, et fut enterré dans la même église des Dominicains, le 6 septembre 1751. – Ces notes et ces dates peuvent être utiles aux personnes qui voudraient s’occuper de la biographie de ces divers peintres de portraits qui eurent de la réputation dans leur temps ; c’est pourquoi nous les donnons ici, quelque indifférentes qu’elles puissent paraître à la généralité de nos lecteurs. Retour
10 Pierre Joseph de Haitze, dont le nom se prononce Dache né à Cavaillon, le 10 novembre 1656, était fils de noble Sauveur de Haitze, natif d’ Ustaritz, dans le pays des Basques, qui, après avoir été officier dans la compagnie des gardes du Comte d’Alais , gouverneur de Provence, épousa Françoise de Gaufridi, dont l’aïeul, natif d’Aix avait fournie une branche dans le Comtat Venaissin. Pierre-Joseph était donc, par sa mère, le parent. du président Jacques Gaufridi (ci-dessus, pag. 45), et non le fils de la sœur de ce président, comme le dit Papon dans son histoire générale de Provence, préface du tome IV, pag. IX. Sa famille vint, peu d’années après sa naissance, s’établir à Aix où son père mourut en 1685, à l’âge de 73 ans, et sa mère en 1695, âgée de 62 ans, 9 mois et 4 jours, ainsi que le disent les registres de l’église paroissiale Saint-Esprit où ils furent enterrés l’un et l’autre de Haitze s’occupa toute sa vie de l’histoire de Provence et principalement de celle de la ville d’Aix, qu’il regardait comme sa ville natale et qui était le berceau de sa famille maternelle. Après avoir passé sa vie entière dans cette ville, il fut mourir à Trets chez l’avocat général de Gaufridi, seigneur et baron de ce lieu, le 25 février 1737, et fut enseveli le lendemain dans l’église paroissiale, ainsi que l’atteste le registre de cette église, contrairement à ce qui est dit dans le Dictionnaire des hommes illustres de Provence (tome 1er , pag. 390) et dans la Biographie universelle de Michaud (tome IX, pag. 318), où on le fait mourir le 26 juillet 1736. On peut voir, dans ces deux livres , la nomenclature de ses ouvrages, imprimés ou manuscrits. Ces derniers, que l’auteur avait légués au couvent des Minimes d’Aix, se trouvent aujourd’hui à la bibliothèque publique de Marseille, ensuite de la spoliation que le préfet Charles Delacroix fit des livres de notre école centrale (ci-dessus, pag. 81, note 2 ); mais l’Histoire d’Aix, qui est le principal ouvrage de de Haitze, est restée à Aix par un heureux hasard, et est conservée à la bibliothèque Méjanes , en 4 volumes in-f°. Nous en possédons dans notre bibliothèque une copie, aussi en 4 volumes in-f°. – C’est une erreur de dire, comme les deux livres ci-dessus indiqués, qu’elle a été imprimée (elle ne l’a jamais été),et qu’il y manque la partie relative au gouvernement du comte d’Alais. Cette partie s’y trouve et fait le sujet, plus amplement traité, d’un autre manuscrit de de Haitze, dont la bibliothèque Méjanes possède une copie, ainsi que nous. En général, les ouvrages de cet auteur sont écrits d’un style lâche et diffus, dépourvus de critique et de citations; mais les recherches immenses qu’il a faites sur l’histoire du pays, doivent lui faire pardonner ces défauts, et c’est un hommage de reconnaissance que nous rendons à son amour pour la patrie, en consacrant un si long article à sa mémoire. Retour
11 Voyez plus bas, le Cours, où est située la maison dans laquelle il était né. Retour
12 Eloge historique de Michel-François d’André-Bardon ; Marseille, Mossy,1783, in-12, pag. 13. Retour
13 Voyez la Biographie universelle de Michaud, tome XXIV, pag. 380, au mot Levieux. Retour
14 Esprit Antoine Gibelin, né à Aix le 17 août 1739, mort dans la même ville le 25 décembre 1813 (et non 1814), fut peintre d’histoire , membre de l’académie royale de Parme et de l’ institut de France, etc. – On trouve dans la Biographie universelle de Michaud (tome XVII, pag. 315), la notice de ses principaux tableaux et de ses gravures, ainsi que la liste de ses ouvrages imprimés, parmi lesquels est sa Lettre sur les tours antiques d’Aix, que nous avons citée plus haut, p.17; mais on y a omis son Projet pour le rétablissement de la salle principale de la maison commune d’Aix, Aix, 1792, 16 pag. in-8°. – M. Esprit Michel Toussaint Sextius Gibelin, son fils, né à Aix le 10 novembre 1791, ancien président à la cour royale de Cayenne , aujourd’hui procureur général du roi prés celle de Pondichéry, a publié dans les Annales maritimes et coloniales (août 1845), un travail très curieux sur la Concordance des lois indoues et du code civil français (Paris, imprimerie royale, 1845, in-8°). Retour
15 Jean-Baptiste Marie de Piquet, marquis de Méjanes, d’une famille noble de la ville d’Arles où il était né en 1729, mort à Paris en 1786, à l’âge de 57 ans. Il fut premier consul d’Aix, procureur du pays de Provence pendant les années 1777 et 78, et signala son administration par une foule d’actes d’utilité publique qui furent depuis surpassés par le don de l’immense collection de livres qu’il avait formée à Aix, à Avignon, à Lyon, à Paris et autres villes de France, et pour l’achat desquels il employa , pendant longues années, la majeure partie de ses revenus. Retour
16 Le docteur Jean Joseph Baumier, natif de Signe, mort à Aix en 1828, légua à la ville d’Aix, où il avait passé sa vie, sa bibliothèque, composée d’environ 6,000 volumes du meilleur choix, pour être remis à la bibliothèque Méjanes. Retour
17 Notice sur la bibliothèque d’Aix, dite Méjanes, etc.; Aix, imp. de Pontier fils aîné, 1831, un vol. in-8° de 312 pag., précédée d’un Essai sur l’histoire littéraire de la ville d’Aix, sur ses anciennes bibliothèques publiques, sur ses monuments, etc.; Essai qui n’est pas la partie la moins intéressante de cet ouvrage. Retour
18 Jacques Gibelin, docteur en médecine, né à Aix le 16 septembre 1744, mort dans la même ville le 4 février 1828 était frère d’Esprit Antoine dont avons parlé pag. 90. Voyez la Notice historique sur le docteur Gibelin, par M. Charles Giraud, aujourd’hui membre de l’institut, inspecteur général des écoles de droit, etc., lue à la séance publique de l’académie d’Aix, le 7 juin 1828, et imprimée à la suite du procès-verbal de ladite séance; Aix, Pontier, in-8°, p. 42 et suivantes. Retour
19 L’abbé Jean-Joseph Rive, né à Apt en 1730, mort. à Marseille le 20 octobre 1791. Appelé à Aix en qualité de bibliothécaire par l’archevêque (M. de Boisgelin) et par les consuls et assesseur, procureurs du pays, il se montra, dès les premiers jours de la révolution, l’ennemi le plus implacable de ceux qui l’avaient fait venir de Paris. Voyez plus bas, rues Saint – Sébastien et des Bernardines, le Cours, et surtout la Biographie universelle de Michaud, tome XXXVIII, pag. 150. art. Rive, ou se trouve le catalogue de ses ouvrages. Retour
20 Nous possédons celui intitulé : Botanicon Aqui-Sextiense, ex Garidello, sur deux colonnes (Synonimia Garidelli. – Nomenclatura Linnoei), lequel est entièrement écrit de sa main. Retour
21 Avant 1669 cette élection avait lieu le samedi le plus voisin du 30 septembre, jour de la fête de saint Michel, et les consuls entraient en exercice le 1er novembre, jour de la Toussaint, pour demeurer en fonctions jusqu’au 31 octobre de l’année suivante. Louis XIV changea cela par lettres-patentes du 15 décembre 1668, portant que l’élection des consuls d’Aix, procureurs du pays, aurait lieu désormais le samedi le plus proche de saint André, et leur installation le 1er janvier suivant. (Voyez plus haut, pag. 48, note 2). Retour
22 Deux greffiers suffisaient en ce temps-là à la tenue des registres et à l’expédition des affaires de l’Hôtel-de-Ville, comme deux greffiers et cinq ou six commis au plus, à tout ce qui concernait la Provence entière. Aujourd’hui quatre préfets et douze ou quinze sous-préfets remplacent les procureurs du pays et occupent des nuées d’employés pour le bon plaisir et la plus grande gloire de la centralisation parisienne. Retour
23 Le premier consul arrivant le dernier, n’avait point de pirouette à faire, attendu que tout le cortège et le public entraient avec lui dans la salle. Retour
24 » M. de Boisgelin, évêque de Lavaur, fut nommé à l’archevêché d’Aix en 1770 ; et l’intention du gouvernement., on le plaçant à la tête des Etats de Provence, avait été de donner puis d’activité à l’administration un peu languissante de cette province. Tout, en effet, changea de face aussitôt qu’il parut ; et ce qu’il y a de plus honorable pour lui, c’est que, placé à la tête d’une administration jalouse, économe, sévère ; transporté dans une province dont les habitants sont renommés par leur esprit, leur sagacité, leur méfiance naturelle de tous les dépositaires de l’autorité ; ne pouvant agir qu’en vertu d’une constitution essentiellement populaire et ombrageuse, et dont les agents n’exerçaient que des fonctions momentanées, il parvint à s’emparer avec tant d’art de l’opinion publique et à inspirer une si entière confiance à la nombreuse succession des administrateurs associés à ses fonctions, qu’il n’est pas survenu une seule affaire, ni arrivé une seule circonstance où le chef de l’administration se soit trouvé en opposition avec ses collègues. » Notice historique sur S. E. Mgr le cardinal de Boisgelin, archevêque de Tours, par un de ses anciens grands-vicaires (l’abbé de Bausset, chanoine d’Aix, évêque d’Alais, depuis cardinal) Paris, 1804 petit in-8°de 58 pag., p. 12. Retour
25 Elle disparaîtra bientôt, suivant une délibération prise depuis peu, pour élargir cette entrée de la rue de l’Official qui est, en effet, beaucoup trop étroite pour le passage des voitures mais nous regretterons personnellement cette maison historique de la boutique rouge. Retour
26 Voyez rue Bellegarde. Retour
27 Le chaperon était la marque distinctive et honorifique de nos magistrats municipaux. C’était une espèce de camail en velours, mi-partie de noir et de rouge, qui couvrait les épaules et descendait jusqu’aux reins. L’assesseur le portait sur sa robe noire de palais. – Voyez, ci-après, place des Trois-Ormeaux. Retour