Les Rues d’Aix – Rue des Jardins


Les Rues d’Aix
ou recherches historiques sur l’ancienne capitale de Provence
par Roux-Alpheran en 2 tomes 1848 et 1851
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RUE DES JARDINS

LLE est ainsi nommée, parce que dans les premiers temps de l’agrandissement de Ville-Neuve, la partie haute des rues du Collége, du Grand-Boulevard et de la Mule-Noire, avoisinant la place de la Plate-Forme, ne fut à peu près couverte que de jardins ; des maisons d’habitation n’ayant commencé à y être bâties que lorsque l’ancien Jardin du Roi et le sol inférieur eurent été peuplés.
Le collége Royal-Bourbon avait dans cette rue une de ses façades exposée au levant, le long de laquelle étaient bâties deux belles chapelles construites dans le XVIIe siècle par les Jésuites, à l’usage de deux congrégations, l’une d’hommes, l’autre de femmes, affiliées à leur institut. Celle qu’on appelait la Chapelle des Dames existe encore, quoique assez délabrée. L’école de dessin, fondée par M. le duc de Villars, gouverneur de Provence, y avait été établie sous la direction de M. Aune, 1 et à la mort de celui-ci, arrivée en 1787, elle fut confiée à l’excellent professeur Jean-Antoine Constantin, l’habile paysagiste, le plus modeste des hommes, natif de Marseille et que nous avons vu mourir à Aix le 9 janvier 1844, âgé de quatre-vingt-huit ans et quelques jours. 2 C’est lui qui y forma, entre autres élèves, MM. le comte Auguste de Forbin et Granet. Aujourd’hui on expose dans cette chapelle, en temps d’hiver, ces crèches mécaniques qui y attirent une si grande foule de spectateurs, notamment de jeunes enfants.
Celle qu’on nommait la Chapelle des Messieurs, bâtie avant l’autre, ne subsiste plus depuis une trentaine d’années environ. Elle était très riche en dorures et en peintures de Daret, de Puget et autres bons peintres de nos pays. 3 C’est dans cette chapelle que s’était établie, en 1790, la Société des Amis de la Constitution, qui y tint sa première séance le 9 mai de ladite année. Ce club était composé des premiers partisans de la révolution, dont un grand nombre pensait de bonne foi, avons-nous dit ailleurs, qu’on pouvait réformer les anciens abus sans renverser l’autel et le trône ; funeste erreur qui, peu d’années après, coûta la vie à une infinité d’entre eux ! ! ! Combien, en effet, furent les victimes des pendaisons qui remplirent, la ville de deuil en 1792 et dans les premiers mois de 1793 ! La plupart se jetèrent dans les sections, et ayant été subjugués par l’armée de la Convention nationale commandée par le général Carteaux, au mois d’août suivant, ils furent obligés de se cacher ou d’émigrer, et ceux qui eurent le malheur d’être arrêtés, portèrent la tête sur l’échafaud. . . . . C’est à cette époque que cessèrent les séances de cette société, dont l’autre partie se réunit à celle des Anti-Politiques-Républicains.

1 Il fut le père de Léon Aune que M. Porte dit avoir été un intrépide guerrier et s’être distingué dans les campagnes d’Italie sous le général Bonaparte auquel Aune sauva la vie, suivant cet auteur, dans une affaire où le général s’était exposé comme un simple soldat. Aix ancien et moderne, 1ère édit., pag. 60, et 2ème édit. pag. 67. Retour

2 Notice sur la vie et les ouvrages de Jean-Antoine Constantin, par M. J. F. Porte, dans les Mémoires de l’académie d’Aix, tom. V, 1844, pag. 97. Retour

3 Les curiosités les plus remarquables de la ville d’Aix, par de Haitze, p. 156. Retour