Les Rues d’Aix – Rue de l’Annonciade


Les Rues d’Aix
ou recherches historiques sur l’ancienne capitale de Provence
par Roux-Alpheran en 2 tomes 1848 et 1851
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RUE DE L’ANNONCIADE

LLE prend son nom de l’ancien couvent de l’Annonciade qui en bordait la ligne méridionale en majeure partie. L’église de ce couvent, dédiée à l’Annonciation de la sainte Vierge, subsiste encore quoique entièrement abandonnée : c’est une propriété particulière qui a été convertie en magasin. Elle avait été bâtie sur les ruines d’une chapelle dédiée à saint Antoine, que la ville avait fait construire hors des murs, au commencement du XIIIe siècle, lorsque la maladie, connue sous le nom de feu sacré, étendait ses ravages dans Aix. Ce mal causait la perte du membre auquel il s’attachait et qui devenait noir et sec comme s’il avait été brûlé. La médecine ne connaissait aucun moyen de le guérir, et l’on estimait que l’intercession de saint Antoine était le seul remède qui put en arrêter les effets, ce qui lui fit donner aussi le nom de feu Saint-Antoine. C’est dans cette église que les syndics (consuls) et assesseur allaient entendre la messe le jour de leur installation, avant la réunion du bourg Saint-Sauveur à la ville comtale en 1357. Depuis cette époque ils allaient à Saint-Sauveur. Aujourd’hui nos magistrats municipaux ne vont nulle part.
En 1537, les religieux Servites, dont le couvent était situé auparavant dans le faubourg Saint-Jean et avait été démoli lors de l’invasion de Charles-Quint, 1 furent mis en possession de celui de l’Annonciade, et ils l’ont occupé jusqu’en 1770, époque de leur suppression. 2 Quelques années après, le couvent des Carmes déchaussés ayant été rasé pour faire place à la grande rotonde située à l’entrée du Cours, là où aboutissent actuellement les routes royales de Paris, de Marseille et d’Italie, ces religieux vinrent s’établir dans l’ancienne habitation des Servites que la ville leur donna, et ils y ont demeuré jusqu’à la révolution qui a supprimé toutes les communautés religieuses.
Pitton rapporte sérieusement 3 qu’une dévotion particulière existait jadis dans cette église à l’occasion que voici : lorsque des enfants mouraient avant d’avoir été baptisés, on les exposait sur l’autel aux pieds de l’image de la sainte Vierge, et à la suite de quelques prières ils donnaient, dit-on, des signes de vie pendant lesquels les religieux leur administraient le baptême.  » En 1558, ajoute-t-il, un de ces enfants fut laissé sur l’autel après les prières ; il reprit sa vigueur, fut baptisé et par une merveille toute particulière, sept cierges rangés sur un chandelier suspendu au milieu de l’église, à plus de douze pieds de terre, furent miraculeusement allumés. Nous en avons vu le verbal pris par le grand-vicaire et attesté de sept témoins.  »
De Haitze raconte les mêmes faits 4 et remarque  » prudemment  » dit-il, que ces miracles lui paraissent avoir été les fruits de la fourberie ou de la niaiserie. Il aurait pu dire, ce nous semble, de l’une et de l’autre.

1 Voyez au second volume, rue d’Italie. Retour

2 Un de ces PP. Servites, qui vivait il n’y a pas encore un siècle, fut interrogé par un frère lai du couvent, qui le pria de lui expliquer ce que voulaient dire les mots in diebus illis qui reviennent si souvent dans l’évangile:  » Je vais te le dire, mon enfant, répondit le religieux : Indie est un mot latin qui signifie les Indes. Quant à busilis, c’est un mot si ancien et tellement vieux qu’on en a perdu la signification ; aussi ne le trouve-t-on plus dans les dictionnaires où je l’ai cherché mille fois et toujours inutilement.  » Retour

3 Annales de la sainte Eglise d’Aix, pag. 217. Retour

4 Histoire manuscrite d’Aix, liv. VII, § 51. Retour